LA
I' SIÈCLE
LEÇON D'OUVERTURE
Membre de l'Institut. Professeur au Collège de France, Directeur l'École des Hautes Études
DEUXIÈME ÉDITION REVUE
PARIS
LIBRAIRIE ANCIENNE HONORÉ CHAMPION- 5,
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LA
lA ESPAGNOLE DU XVIIe SIÈCLE
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DU MÊME AUTEUR
A LA MÊME LIBRAIRIE
Catalogue des manuscrits espagnols de L* Bibliothèque nationale, 2 vol. in-4. ̃ Études sur l'Espagne.. Première série. 2e édition revue et augmentée. 1895: Pet. in-8. 1. L'Espagne en France. II. Recherçhes sur Lazarille de Tormes.. III. L'histoire dans Ruy Blas. IV. Espagnols et Flamands. V. Le Don Quichotte envisagé comme peinture et critique de la société espagnole du xvn et du xVII° siècle. -Deuxième série. In-8. Nouvelle édition revue et augmentée. 1906. In-8. 9 fr. Grands d'Espagne et petits princes allemands au xvme siècle d'après la correspondance inédite du comte de Fernan Nunez avec le prince E. de Salm-SaIm et la duchesse de Béjar.
Troisième série. 1904'. In-18. 9 fr. I. La lettre de Sanche IV à Alonso Pérez de Guzman. II. Un drame historique de Tirso de Molina. III. Da Marina de Aragon. IV. Une comédie de collège. V. Histoire de deux sonnets. VI.. Soldats espagnols. VII. Un grand d'Espagne, agent de Louis XIV. VIII. La golille et l'habit militaire. IX. Fernan Caballero. X. L'espagnol de Manzoai. XI. Mélanges de philo-, logie.
-,Nouvelles études sur sainte Thérèse. 191 1. In-8. 2 fr. 25
Historiographie de Charles-Quint. Première partie, suivie des Mémoires de Charles-Quint, texte portugais et traduction française. In-8. 10 fr. Cinq recueils de pièces espagnoles. 191 1. In-8.
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LA
ESPAGNOLE, (inK|]DU SIÈCLE
LEÇON D'OUVERTURE
PAR
A. M0REL-FATIO
Membre de l'Institut, Professeur au Collège de France, Directeur â l'École des Hautes Études
DEUXIÈME ÉDITION REVUE
PARIS
LIBRAIRIE ANCIENNE HONORÉ CHAMPION ÉDOUARD CHAMPION
-QUAI MALAQUAIS
192
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AVANT-PROPOS
Mes études sur la Comedia espagnole datent de 1875, alors que peu satisfait de l'édition du Mâgico prôdigioso, publiée chez Hachette, en 1875, par Magnabal, agrégé des lettres, je me rendis à Madrid p ou r collationner le manuscrit de la bibliothèque du duc d'Osuna CEI Magico prodigioso, comedia famosa de ̃ Don Pedro Calderon de la Barca, publiée d'après, le manuscrits original de la bibliothèque du duc d'Osuna, avec deux fac-similés, une introduction, des variantes et des notes. Heilbronn, Henninger frères, 1877, in-8° de lxxvi et 25 pages). Plus tard, en 1880, étant chargé de cours à l'École des Lettres d'Alger, je fis un cours sur le théâtre espagnol, que je répétais à Paris, en 1884, lorsque M. Paul Meyer me chargea de le remplacer au Collège de France, dans sa chaire de langue et littérature de l'Europe méridionale.
C'est la brochure, totalement épuisée, que je réimprime La Comedia espagnole dit XVIIe siècle,. Leçon d'ouverture. Paris, F. Vieweg, 1885.
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Jules Lemaître, qui avait été mon collègue à Alger, voulut bien écrire l'article suivant dans la Revue politique et littéraire du io janvier 1885
« M. Morel-Fatio développe d'abord cette idée, que tous les. peuples ont bien des drames et des comédies, mais.que tous n'ont pas un théâtre, c'està-dire une longue tradition dramatique, une série de pièces conçues d'après la même formule. 'A ce compte, la Grèce antique, l'Espagne et la France ont seules,un. théâtre, et l'Angleterre n'en a point, quoiqu'elle ait Shakspeare,. Puis, M. Morel-Fatio définit la comédie espagnole, en se servant du Discours de Lope de Vega « De la nouvelle manière de faire « aujourd'hui les comedias, » Il explique enfin com- ment et. pourquoi ce théâtre n'égale pas le nôtre et celui de Shakspeare, et par où il est néanmoins ori- ginal et intéressant.
« Cette ét.ude; très serrée et très, suggestive, écrite d'un style vigoureux et précis, forme une remarquable introduction à l'histoire du théâtre espagnol. » Le plus ancien, correspondant de l'Académie des Inscriptions (1890), et le savant linguiste, M. Hugo
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Schuchaidt, qui m'a ipas signé ;le Manifeste (des • intellectuels allemands de 19 14 m'adressa de Graz une carte!postale « Cher Monsieur, Merci 'bien pour l'élégant résumé- que vous donnez de la comédie espagnole du xvne siècle. Aussi les Italiens ;amient. à dire Lope^ deVega. Je vous le répète que je lis les Comedias non seulement .pour m'instruire, mais. aussi parce que je les ,goûte..Nous autres Allemands, ;nous sommes des romantiques incorrigibles. »
Encore à Alger, je publiai, ;à l'occasion du second centenaire de la mort de Calderon, k brochure suivante Calderon. Revue critique des travaux d'. 'érudition publiés. en Espagne à V-mcasion du second centenaire delu mort du, poète, suivie de documents relatifs à ^ancien thédtré espagnol, Paris, 1881, qui causa un assez gros scandale, et puis un article, dans la Revue critique du 24 juillet 1882, sur une romance faussement attribuée àCâlderon. Rentré à Paris, à partir de 1884, je fis au Collège de France, dans le Bulletin Hispanique, dans LeMoliéristeet YiEncyclopeediabritanmcanne série de leçons ou d'articles sur divers points du théâtre, espagnol Alarcon et La Verdad sospechosa Lope de
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Vega Tirso de Molina et la Prudencia en la mujer (qui parut dans le Bulletin Hispanique, t. II, p. T78etsuiv.); Lope de Vega, Arte nuevo de ha%er comedias en este tiempo (Bull. Hisp.; t. III, p. 365-405) Les défenseurs de la Comedia (Bull. Hisp., t. IV, p. 30-62); Les Origines de Lope de Vega (Bull. Hisp., t. VI, p. 385 3); Le Molièrlsie d'août 1886 Lopede Vega(TheEncyclopoedia britannica, 9e édition, Londres, 1 888, t. XXIV, p. 121-124); et, en collaboration avec Léo Rouanet, Le théâtre espagnol. Paris, s, d. Pour, les mémoires qui n'étaient pas encore en état d'être publiés^, voyez le Catalogue des manuscrits de M. Morel-Fatio et de H. Léonardon d&nnés à la Bibliothèque de Versailles. Bordeaux, 1922 (extraitdu Bulletin Hispanique, 1921-22). .1. J'y ai imprimé la fin de fiesttr, qui est une traduction du Bourgeois gentilhommede Molière (El labrador gentilhombrè), pour être agréable à Marie-Louise d'Orléans, venue à Madrid pour épouser Charles II. La traduction à été attribuée à Pablo Polpp, par D. Emilio Cotarelo (Boletin de la R. Academia espatiola, t. X, p. 126), qui a eu tort de dire: « Carecen, pues, de fundamento la especie de que fuese Calderôn mismo el traductor de esta pieza. sobre todo por los escritores del otro lado del Pirineo ». J'ai dit moi-même que « la question reste indécise ».
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LA COMEDIA ESPAGNOLE DU XVIIe SIÈCLE
Toutes les nations, anciennes ou modernes, ont une littérature dramatique, toutes ont produit en plus ou moins grand nombre des œuvres tragiques, comiques ou tragi-comiques mais il n'est pas vrai que toutes aient, à strictement parler, un théâtre. Pour qu'une nation réussisse à créer un théâtre, qui légitimement porte son nom, qui d'un commun accord soit considéré comme lui appartenant en propre et comme représentant d'une façon éminente son génie, il lui faut le concours assez rare de plusieurs circonstances.
Il lui faut en premier lieu une société fortement Cette leçon a été lue, le 4 décembre, au Collège de France, par son auteur, appelé à remplacer M. Paul Meyer dans sa chaire de langues et littératures de l'Europe méridionale, pendant le premier semestre de l'année 1884-1885. Il a paru utile d'y ajou- ter quelques notes.
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centralisée, dont tous les membres se sentent depuis longtemps unis et-solidaires, qui tous possèdent un fonds ;d liées, de sentiments, le souvenirs communs et qui, par suite, aient tous les mêmes mœurs et les mêmes aspirations. Une scène nationale, où puissent être transportés soit des passions tragiques, soit des travers et des vices capables d'émouvoir ou d'affecter .la société tout entière, n'est réalisable qu'à cette condition1..
Mais cela ne suffit pas. Il est nécessaire encore que le drame quel qu'il soit, destiné refléter l'esprit de cette société, trouve une forme originale et répondant si bien aux goûtes et aux tendances du milieu qu'elle se fasse aussitôt accepter par le plus grand nombre et prenne aisément le pas sur toutes les autres manifestations de l`'art dramatique C'est parce que les conditions que je viens (f indiquer ont été remplies par les Grecs que l'on peut, dans l'antiquité, parler d'un théâtre grec, tandis qu'il in'existe pas de théâtre latin. Les Romains i. -Cette première et très essentielle condition d'une scène nationale a été parfaitement expliquée par M. K. HMlebrand dans ses Études italiennes. Paris, 1868, p. 145 et suiv.
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cependant avaient la centralisation politique et litté–rake, ils avaient une histoire populaire et des mœurs communes ¡nais ils ne surent jamais iiiventer un genre de-, drame qui fût vraiment à eux, vraiment la représentation de'leur caractère national ils ne surent qu/adapter leur langue et à leur littérature les œuvres grecques. Aussi dira-t-on des Romains qu'ils ont des tragédies et des comédies, mais non pas qu'ils: ont un théâtre.
Parmi les nations modernes, deux seulement me. semblent mériter d'être, à cet égard-, assimilées aux Grecs l'a France et l'Espagne. Ces deux nations seules, ont offert, à une certaine époque de leur existence, un terrain propice à l'institution d'un théâtre, et chez l'une comme chez l'autre, il est arrivé qu'une forme spéciale, créée ou fixée tout au moins dans ses. traits les plus essentiels par un poète de génie, s'est avec la complicité du public emparée de la scène, s'y est si solidement établie qu'il a fallu des siècles pour l'en déloger; encore en subsiste-t-il de nos jours, chez l'une tout au moins de ces nations, bien mieux que des, dé bris.
En France, cette forme par excellence, qui a donné
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à notre théâtre son unité et son originalité, est la tragédie; c'est la tragédie qu'on entend surtout, c'est à elle qu'on pense en premier lieu, plutôt qu'à notre comédie, malgré le grand nom de Molière, lorsqu'on parle du théâtre français classique. Ce privilège que nous reconnaissons à la tragédie, elle le tient non seulement de sa nouveauté, de sa valeur intrinsèque, de sa parfaite appropriation à l'esprit de notre race, de l'incomparable éclat de ses débuts, elle le tient encore de sa continuité, de sa longue carrière, qui, d'étape en étape et en dépit de nos révolutions politiques et littéraires, s'est étendue jusqu'à nous. Au lieu donc de nous plaindre, comme il est devenu trop habituel de le faire, des entraves apportées par nos poètes du xvie et du XVIIe siècle à l'expansion de notre muse tragique, au lieu de traiter de puériles les règles si strictes dans lesquelles ils ont emprisonné leur drame, bénissons-les plutôt d'avoir su extraire de la tragédie antique une formule nouvelle, d'avoir torturé Aristote pour en obtenir comme une consécration de leurs propres théories, bénissons-les de leurs préjugés et de leurs exagérations, car c'est à eux que nous devons de posséder un théâtre comme les
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Grecs ou les Espagnols, et non pas seulement dés tragédies ou des'comédies comme les Romains, les Italiens et les Allemands. Sans cette réglementation sévère qu'ils réussirent à introduire et que Corneille, par le prestige de son nom, imposa à ses contemporains et à ses successeurs, la forme de notre drame tragique fût restée indécise et flottante, chaque poète à son tour eût tâtonné; perdu beaucoup de temps et de talent pour se créer un cadre approprié à ses conceptions en revanche, peut-être, l'imagination se serait donné plus librement carrière et nous aurions eu/qui sait ? dans plus d'un genre, des tentatives intéressantes,, d'heureuses trouvailles, mais notre art dramatique eût incontestablement perdu en unité, en forte concentration, ce-qu'il aurait gagné en variété.
Les Espagnols ont partagé notre sort, à eux aussi est échu un vrai théâtre. Mais avant d'aborder ce sujet, je dois prévenir une objectior qui pourrait m'être adressée. Que faites-vous de l'Angleterre ? Les Anglais ne passeraient-ils pas à juste titre pour posséder un théâtre ? A vrai dire, je ne le crois pas, Il manque au théâtre anglais, si ce nom même peut être employé,
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s'il signifie quelque chose, cette régularité et cette continuité dont je parlais tout à l'heure et qui. caractérise si nettement notre théâtre et celui des Espagnols. Ici, un seul nom résume tout, il n'y a qu'un seul point lumineux vers lequel tout converge Shakspeare, et qui dit théâtre anglais dit théâtre de Shakspeare, ou ne se fait pas entendre. Assurément cela seul est assez, et un génie de cette taille peut valoir autant et mieux qu'une grande école drama- tique mais en résultat, cette école, cette tradition, cette forme unique, et continue, que d'autres peuvent montrer, les Anglais ne l'ont pas. Shakspeare n'a rien imposé à ses successeurs, qui ne l'ont pas imité dans son incomparable grandeur il reste isolé, sans attache avec ce qui le suit. On ne saurait donc mettre l'art dramatique anglais sur la même ligne que l'art dramatique français ou espagnol, ou en d'autres termes, le théâtre anglais, c'est-à-dire le théâtre de Shakspeare, n'existe pas au même titre ni dans les mêmes conditions que le nôtre ou celui de nos voisins de la péninsule ibérique. C'est une prodigieuse exception, ce n'est pas un organe essentiel, une manifestation générale et indéfiniment prolongée de la littérature nationale.
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En Espagne, au contraire, nous sommes tout aussitôt frappés de l'extrême uniformité et homogénéité de la poésie dramatique, de sa force de résistance, de son éblouissante richesse. Une fois la recette trouvée et le cadre arrêté, le théâtre espagnol ne, s'en écarte plus, il marche d'un pas sûr dans la voie ouverte chacun se plie d'instinct à la règle, sans se douter même qu'on y pourrait changer quelque chose, faire mieux ou faire autrement. Le drame espagnol ou, pour le nommer par son nom, la « comedia », dont les commencements coïncident à peu près avec l'entrée du xvne siècle, vit pendant tout le cours de ce siècle d'une vie large, exubérante. Il résiste à la chute de la dynastie autrichienne, si populaire depuis Philippe II et d'un espagnolisme si pur, qui avait tant è-ontribué à son succès; il résiste à l'avènement des Bourbons, aux changements considérables que cette domination étrangère, l'influence croissante et envahissante de la France apportent à la vie publique, aux mœurs et à la littérature de la nation, il résiste, mais en perdant du terrain. Écrasé qu'il est par le mépris des adeptes de notre système dramatique, il se réfugie de plus en plus dans les genres bas, où se
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concentre alors le vieil esprit espagnol, et de cette façon il réussit à traverser, quoique .péniblement et- non sans subir, des mutilations, cette période hostile et ingrate. Avec le réveil de la littérature nationale, le drame classique recouvre,: dès le premier tiers de ce. siècle, de nouvelles forces,, et en s'accommodant aux circonstances-regagne les positions abandonnées. Aujourd'hui encore, c'est la- comedia- des Lope de Calderon, légèrement modifiée, qui règne sans conteste chez nos voisins;, et tandis que chez nous la tragédie de Corneille, de Racine et de Voltaire semble ne plus, vouloir renaître de ses cendres éteintes., la forme inaugurée en Espagne. au xvii* siècle est restée assez vivace pour répondre aux nécessités de l'art dramatique contemporain, pour satisfaire aux exigences d'un public dont -l'idéale cependant notablement changé depuis le temps des Philippe.
Qu'entend-on par çomedia dans la littérature espagnolè ? Ce mot de comedia l, bien loin de pouvoir 1. On sait qu'en général les drames espagnols du XVIIe siècle portent dans les imprimés du temps le titre de comedia famosa. Cet adjectif fanaosa, qui étonnait Voltaire, peut être rendu en
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être traduit par « comédie », de représenter ce que les anciens et nous-mêmes entendons par comédie, est un terme très large qui embrasse tous les genresde drame, que les effets en soient comiques ou tra> giques, à l'exclusion d'une part, d'un certain drame religieux ou liturgique, que les Espagnols nomment auto I, et, d'autre part, des genres inférieurs, de la farce, de l'intermède, du vaudeville (zarzuela), des i français par « applaudie » la comedia famosa est celle qui a réussi, l qui a été acceptée au théâtre. Une autre épithète, oubliée aujourj d'hui et que ne mentionnent pas les historiens les plus récents s? du théâtre espagnol, est grande: la gran comedia revient presque aussi souvent dans les éditions anciennes que la comedia famosa. C'est ce qui n'avait pas échappé à Ignàcio de Luzan, l'excellent t critique du xvme siècle « Errados andan los que piensan ser ya < poétas por haber. escrito sin tino ni regla una comedia, que, >l como quiera que sea, no dexara de ostentar en la impresion el vano epiteto de famosa o de grande. » (La poética, éd. de 1789, j t. II, p. 249.)
l i. Il y avait l'auto sacramental ou del Corpus (Fête-Dieu) et J'auto al nacimiento (Noël) Un auteur du xvne siècle, fort inconnu, Luis Alfonso de Carvallo, prête à auto le sens général de comedia 1 « Auto es lo mismo que comedia », dit-il, dans son Cistie de j Apolo (cité par von Scfrack, Qfisehtehtçder dramathchen Literatur und Kunst in Spanien, t. mais cette opinion lui
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pièces de circonstance, des féeries mythologiques (fieskts), L'extension donnée au sens de comedia dans k langue du métier, au xvu'" siècle et même aupamvaut, est un fait dûment constaté et qui ne souffre aucune discussion. Lope de Vega l'emploie toujours comme équivalent de drame en général I et en dehors même du milieu des auteurs et des gens de théâtre l'acception nouvelle a cours de purs théori- ciens l'adoptent et la consacrent dans leurs traités J. D'un de ses prédécesseurs, le capitaine Vi rues, -il dit « O émkieBt esprit»,, repose en paix J Toi à qui les Muses comiques doivent leurs meilleurs commencements tu as écrit des ir-agédies applaudies y> (Arte m\evo d# hacer comedd-as en este Ici Mvsas cômims est réquivalent de théâtre en général.. Ailleurs, dans une note mise à la suite d'une de ses pièces (El Vidunte Gespedes), qu'il intitule expressément iragicomedia, il observe que en œstu mniedia les amours d'un -des personnage sont fabuleuses comédie est donc le terme générique, qui abrite les acceptions spéciales. Lope va plus loin encore, il étend même au théâtre liturgique, qui cependant formait à lui seul un genre bien délimité, la dénomination de comedia ainsi k prologue d'un de ses autos de la Fête-Dieu fait allusion àdes vcsmedias à la gloire «et en l'honneur du pain (c'està-dire du corps du Christ), que cette ville couronnée (Madrid) célèbre avec :si gralade pompe ». Cf. von Schack, 1. c., t. II, p. 74 et 94.
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didactiques. Ainsi le. théologien Juaii CaramudLLobcowilz, fort discrédité comme maoralis-te, car il -a mçu le fouet de Pascal; ornais qui, dans ses travaux 'de rythmique espagaote, a fait preuve et de perspicacité, s'empare ëe la teoiiinologie de Lope et la ééfeni Mime énergie :a .un sens -en ^effet, toute tiragmèh est mais l'inverse n,est pas vrai. La wmueMa est la cepniéseiaîatioii d'un évém'ena€nt historiqœ ou d'erate fictàon, et peut avoir une issue heureuse ou malheureuse. Dans !le pre-mier cas 'elle garde simEpienient le nom ;d.e comoedia^ dans le second, elle est appelée ir agita ou ou encore tragoeàia. Telie est la vraie différence de ces mots, quoique d'autres y puissent trouver à redsire x. » Si les Espagnols du xvne siècle ont ami détourné le de mm sens précis et restreint, .il va de soi qu'ils :n3rasent de cette licence 'qu'en ce qui les i. Pf'wnis calwnus, iCarnpaniae, 1668, \t. II (Rhytfmmà)., p. 701. Tout .ce que le P. José de Alcazar dit de \s..comedia dans son Ortografia castdlana (ras.) est tiré de la Rhythmique de Caramuël (voy. YEnsayo de iina hïblioteca espanola de Gailardo, t. 1, Ncl. 109 et suiv.).
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concerne; jamais ils n'ont élevé la prétention d'étendre à d'autres théâtres une dénomination qui ne convient qu'au leur. La comedia désigne une action. dramatique quelconque, sans égard pour les effets qu'elle doit produire dans l'âme du spectateur, mais une action dramatique telle seulement que les Espagnols l'ont conçue; la comedias est le drame espagnol et n'est que cela. Il convient donc de commencer par définir ce drame national, qui tient du terroir les traits qui le distinguent, lui assignent une place déterminée dans l'histoire de l'art, et lorsque nous en connaîtrons le procédé, il nous sera plus facile de nous expliquer pourquoi il a pu mériter ce nom, qui ne laisse pas de surprendre à première vue.
Tous les auteurs espagnols qui ont disserté, au XVIIe siècle, sur la forme de leur art s'accordent pour insister sur le caractère essentiellement mixte de la comedia c'est l'expression qui revient partout.
« Aujourd'hui la comedias (ou, comme d'autres disent, la représentation) consiste en une certaine rniscellanée, où il y a de tout », écrit en 1617 un contemporain de Lope, Cristobal Suarez de Figueroa L'année d'avant, en 1616, certain poète de 1. El Passagère, éd. de Barcelone, 1618, alivio III.
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Valence, qui s'est caché sous le pseudonyme de Ricardo de Turia, déclare qu' « aucune des comedias qu'on représente en Espagne n'est à proprement parler comédie, mais bien tragi-comédie, c'est-à-dire un mélange de comique et de tragique, qui emprunte au dernier genre ses personnes illustres, l'action grande, la terreur et la pitié, et au premier le sujet particulier (el negocio particitlar), le rire et les plaisanteries. Et que personne, a.joute-t-il, ne tienne cette mixture pour impossible, car il ne répugne ni à la nature ni à l'art que dans une même fable concourent des-personnes illustres et humbles Lopelui-même signale souvent cette confusion des genres à Guillen de Castro il rappelle « la coutume d'Espagne, qui a déjà réussi à mêler, contrairement à l'art, les personnes et les styles 2 ». Un de ses meilleurs élèves, qui devint son émule, Tirso de Molina, 'dans son apologie de la comedia nueva retenons le mot invoque, comme Ricardo de Turia, l'exemple 1. Apologético de las comedias espaiiolas (Norte de la poesia espcznola. Valence, 1616).
2. Dédicace de Las almenas de Toro à Guillen de Castro (parte XIV, ano 1620).
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dfe la natœe: fHDur auto mer le; caractère Gûmpossics; du tklâne: de souk nm$rej ey il est Ment" près de s'écrier awec Hugo; « T©ni:ee: qui est. dans la nature est daaas FarL » Su en greffant,, dit-il, une-. espèce une, mËx%, om en ofetient: ume troisième; la. sécartenait-dik: pas èes; prêtœ po^rEpcsi a-e te sur k?. ne. tirerak'elle pas -un aimable mélange: de ces deux genres opposésr et^, eaarpaartidpaaM ainsi ée^l'un à l'autfeEer n'in,troduicahi-elie pas daiias sa faUe- soit dies personnes iEusurea», à ff exemple, de- la soit des, perSDnoes pladsain^ ou ridicules, à l'exemple ée\la;. eeîïiéèie, l ̃ »s.. Tel est le ca^aiCtère- du n©useam dàranrie. Le Gonfasi«Dn. des; genres, et des styles, que les aaaôgm et les maéêraies depuis la Renaissance voilà' ee qui spfiEiifie ce podaik indigène.. It m'eim Lut pas davantage: peiair Eenrére: plauisiMe le choix: de l'étàquiette qui lui a. été apposée.
¥om désigne» une ferme; nouvelle, les Espagnols auraient pu créer un terme nouveau au s en tenir a i. de Toledo, éd. de Barcelone, 163 F, f. 70V
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quelque dénomination yaguex telle que comme, d'après Suarez de Figueroa., quelques-uns le demandaient ils auraient pu, à là rigueur, si le mot n'avait été un peu lourd et pédant, prendre tragkouudia. Ils aimèrent mieux ne pas sortir de la tradition,, rester fidèles aux noms s'ils ne gardaient pas les choses* et contraints alors de choisir entre tragédie et comédie, ils durent se décider pour le second terme. Cela se conçoit sans peine. Qu'est-ce qui, aux yeux des poètes espagnols; tous plus ou moins imbus d'un aristotélisme assez altéré, marquait surtout la différence entre la comédie et la tragédie ? Le dénouement, heureux dans le premier cas, malheureux dans le second. La condition des personnes, la nature des sujets ne venaient qu'en seconde ligne, et bien i. « La comeiïa ô sea, como quieren, représentation » (El Passagent, ali-vio III). jet ne vois guère que Quevedo, dont la solide éducation classique répugnait à l'emploi de comedla au sens espagnol, qui se soit, au. xvnc siècle, servi de ce mot représentation il a intitulé un de ses drames représentation espanoîa (voir la liste des oeuvres dramatiques de Quevedo par D. Aureliano Fernadez-Guerra. dans La Barrera, Calâhgo del atttigiio teatro çspanol, p. 313). Dans le plus ancien théâtre espagnol, represen'lation s'applique souvent à des pièces de contenu profane ou religieux; cf. l'italien rappresmtaitcme.
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avant l'époque qui nous occupe, la. scène nationale avait vu souvent des personnes illustres et même royales mêlées a des actions dont ni la conduite, ni les péripéties, ni le style n'offraient rien d'exclusivement tragique. L'issue du drame reste donc le point capital, qui seul le classe, permet de le rattacher à un genre plutôt qu'à un autre. Eh bien, sans rechercher comment s'est en fait comporté, à l'égard du dénouement, le nouveau drame espagnol, sans entre- prendre de dresser une statistique de ses catastrophes, on est amené à reconnaître qu'en vertu précisément de ce caractère mixte qui le distingue, en vertu de la rencontre en une même action de personnes de toutes les catégories sociales, le dénouement devait en être plus souvent heureux que tragique. Rien de plus naturel, par conséquent, que de donner la préférence au terme dont l'emploi se justifiait neuf fois sur dix, rien de plus logique que de comprendre sous la rubrique de comedias tous ces drames, sans tenir compte des cas exceptionnels qui y répugnaient. Libre d'ailleurs aux scrupuleux de spécifier plus rigoureusement la nature de leurs ouvrages Lope, par exemple, ne s'est pas fait faute
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d'intituler telle ou telle de ses pièces tragedia ou tragicomedia l. Mais plus on avance dans le XVIIe siècle, plus le sens ancien et traditionnel du mot comedia s'efface, plus il devient élastique, absolument identique à ce que signifie en anglais play ou en allemand Schauspiel les drames les plus noirs de Calderon sont encore des comediùs.
Cetté comedia nueva 2, comme la 3 qualifie Tirso de i. Ainsi El valiente Cespedes est dénommé tragi-comedia d'autres pièces comme Roma abrasada, El marido mas firme portent le titre de tragedia ou tragedia famosa.
2. Dès la fin du xvne siècle, ce nom de comedia uueva commence à se substituer à la traditionnelle comedia famosa et tend à l'éliminer les drames, par exemple, d'Antonio de Zamora ( 1 660-1740) sont, dans ses oeuvres, tantôt intitulés comedia famosa, tantôt comedia nueva, sans qu'on voie du tout ce qui, dans l'espèce, a pu déterminer le choix de l'étiquette. Toutefois, l'ancienne et célèbre épithète était trop ancrée dans le langage théâtral pour se laisser facilement supprimer, elle persiste même après l'introduction en Espagne de la tragédie française, et c'est ainsi que El sacrificio de Ifigenia, drame de José Canizares, composé vers 1716, « pour montrer les comedias selon le style français », comme dit expressément l'auteur, s'intitule encore « comedias famosa en cinq actes ». Comedia nueva, à la fin du xvne siècle, a plutôt le sens de comedia originale, non refaite d'après Lope ou les autres poètes du commencement du siècle.
3. « De estas impertinencias y otras tales Ofrecio la comedia lihre y suelta » (Pedro de Urdemalas, jornada
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Mcdfca, om cette « œm&éist libre comme l'a. loaae fois nommée Cetmnte% qm la doit-on ?. FcÊUs^re exclusive d'un semlir ou p^ocède-t-elle par ées êvotatïQos successif es, auxquelles, piiîsieitrs, omt am£emm d'une forme ancienne du théâtre natïaoat ? Le gmnd nom- de' Lope de Vega est, à la, e©aiii!aisi. Bspuis, ¥©litait?e et à cause de. Voltaire, beaiacotip de Fitançais, même des écrivains graves, ont pris la fâcheuse habitude de HOfflaar TLûpeLepe^. (Lapes- de Weg-a, dans- fa Relation dit voyage $%s$ag>m- (Paris-, 169-1, t. H, p. i§j). de la comtesse d'Aultaoy Lapez de Vega, dans Mignet, Négociations- relatives à la successmx t. l, p, xxxr. Ce qui n'"avait pas. échappé à Ca-dalso « Lope de Vega Cârpios (q^re- les F^a^ceses han: dado en llaînar Èepetç}. » (Cartfos timmuecm, na LXVIL)]Et les Espagnols, de se nous, qui confondons nombre et apellido,, en quoi ils ont parfait entrent raison. A© temps où la littérature' espagnole était coïEtïus et appréciée en. France, nous rr'àuïions jamais Gonimaïs. cette- foute ainsi au; xvne siècle, l'on disait bien plus correctement, et à Fitalfeane L,- Lope Se Kè'gtte (P'. BbU'homrs)'. Mais if n'y a pas que nous de barbares. Ce n-'est pas sansquelque malfe plaisir que fa-î retrouvé notre Lope% dans Féerit d'un, AMemandy grand connafeseiar de la iMtératureespagnoîe, V. A. Huber (v. son discours intitule' Ueber spamische Nationatit/àt imd' Humt ihfi iè-undi Berlin, 1852, p. 26). Et même il'se trouve des. Espagnols, odieusement afmncesad<QS qui laissent passer le bout de l' oreille. Je lis, par exemple, dans El pensadvr in®tfrifens&, journal littéraire assez spirituel' de la fin du siècle
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soirée de tours,, étroitement associé la comedia esparsépare pas.- ce genre dramatique du poète que passe pour en être l'inventeur, je ne viens pas battre en brèche l'opinion reçue. Tout compte fait, il est juste de tenir Lope de Vega pour le père du nouveau drame, avec cette réserve cependant qu'on ne prendra pas cette paternité trop au pied de la lettre. La œmeMa n'est point sortie un beau jour tout armée du cerveau du poète d*autres lui ont fourni la matière, une matière, il est vrai, a peine dégrossie, qu'il s'est chargé de pâlir. Les éléments du poème dramatique, qu'il' a fait sien, existaient, mais sans cohésion suffisanté il fallait avoir l'idée de les mieux fondre en un tout harmonieux,, capable de s'imposer et de prendre. d'emblée la première place.
Comment il s'y est pris pour donner au théâtre espagnol sa. forme définitive et clore la période des essais et des- tâtonnements, nous allons, l'apprendre dernier (t. I, p. igi) « Si los Lopez, los Calderones, los Solises, y otros talentos de nuestro pais corrompieron el arte de La comedia. » Français, Allemands et Espagnols n''ont donc pas grand'chose à se reprocher.
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de sa propre bouche, car Lope n'a pas seulement prêché d'exemple avec ses dix-huit cents drames, dont un, tiers à peine nous a été conservé, il a dogmatiquement exposé la théorie de son art.
Ce fut donc en 1608 sur la demande des i. Quoiqu'on ait prétendu le contraire, il me paraît démontré que la seconde partie des Rimas de Lope, à laquelle est agrégé l'Arte nuevo de hacer comedias en este tiempo, n'a été publiée pour la première fois qu'en 1609, et comme l'errata de cette édition de 1609 porte la date du 29 janvier, il s'ensuit que Lope a composé son discours au plus tard dans l'année 1608. De toutes façons, il est sûr que l'f!rte n'a pas été imprimé en 1602 avec la première partie des Rimas, et qu'il n'a pas été imprimé non plus dans l'intervalle de 1602 à 1609; ceci résulte Iode cette note de la seconde partie des Rimas (éd. de i 609) « Estas Rimas tienen licencia y privilegio, aunque no se impnmieron con las passadas la primera ve%, por no hazer tan gran volumen » 2o du fait que les pièces préliminaires du volume publié en 1609 sont toutes ou de 1602 ou de 16og, ce qui prouve qu'il n'y a pas eu d'éditions_des Rimas (les contrefaçons barcelonaises ne comptent pas) entre ces deux dates. Mais l'Arte pourrait avoir été « composé » avant 1608. J'en conviens, si cependant un détail de ce discours ne semblait indiquer le contraire. Lope y avoue quatre cent quatre-vingt-trois comedias or, ce chiffre, comme l'a remarqué M. von Schack, est plus près du chiffre de cinq cents, que Pacheco reconnaît à Lope en 1609 (préliminaires de la Jerusalem conquistada), que de celui de deux cent dix-neuf, accusé par Lope lui-même dans la préface du Peregrino (1603).
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membres d'une académie littéraire de Madrid I, qu'il se décida à écrire le discours célèbre intitulé « De 1 On ne sait à quelle académie Lope a voulu faire l'exposé du nouveau système dramatique; pour ma part je ne serais pas éloigné de croire que le poète n'a pas entendu s'adresser à aucune compagnie en particulier, mais qu'il parle aux lettrés en général, à ceux qui avaient coutume de se réunir en academias pour se lire leurs vers. Une autre question se pose à propos de ce discours. L'Arte nuevo de hàcer comedias en este tiempo serait-il le seul écrit de Lope sur son art ? Cela n'est pas sûr, et voici pourquoi. Personne, à ma connaissance, n'a pris garde à un passage fort curieux du Para todos de Juan Perez de Montalban (imprimé pour la première fois en 1632) qu'il importe de transcrire textuellement « No hago aqui memoria de los passados, que las han escrito (les comedias). porque frey Lope de Vega Carpio, con la gran noticia que en esta parte tiene, ha escrito copiosa y cientificamente un trntado, solo en abono deste illztstrissinto arte y exercicio, a cuya edicion, que saldra muy presto me remilo » (Memoria de los que escriven comedias en Castillcz, à la fin). Ainsi, Montalban, fervent disciple de Lope et son ami intime, annonce, en 1632, comme devant paraître « très prochainement » un traité copieux et scientifique de son maître sur la comedia. Il devait savoir ce qu'il disait, et il est impossible qu'il ait voulu parler de Y Arte nuevo imprimé dès 1609, que le disciple connaissait mieux que personne et qui, de plus, n'est ni copieux, ni scientifique. Mais qu'est-il advenu de ce tratado ?
[« En terminant, je dois rappelerune allusion encore inexpliquée de Juan Pérez de Montalban, sur laquelle j'avais naguère attiré l'attention des érudits. Cet ami et disciple de Lope, dans sa
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la aoûvelk mamère de ifaire ààjourd'hui les cmmdias. ?» Mais à i<e lice quelle* surprise et quelle déception! Au lieu d'un manifeste tapageur, d'une éclatante fanfare dans te goût, par exemple, de k préface de Crornwell, c'est une dissertation pile et terne, mal composée et confuse, qui annonce avec toutes sortes de précautions l'avènement de l'ère raoïuMemorla de los que escrïven comedias era Castïïîa se/lamente, qui fait suite au Para todos imprimé pour la premiëre fois à Madrid en 1635, s'exprime en ces ternnes :.« No hago aqui memorîa de los passados quelaslian escrito (les comedias). porquefrey Lope de Vega Carpio, con la gran ncfticia que en esta parte itiene, ha escrito copiosa y cientificamerïte ur tratado, solo en abono Jeste fflustrîssimo arte y exercicio a cu\ya edicion, que saldra miay presto, me remito. » Montalban peut-'il ici avoir voulu désigner Y Arte Il faudrait _pour cela qu'il eût écrit le passage en question avant 1609, ce qui semble Impossible, vu les auteurs qu'il cite dans sa Memorîa et dont plusieurs ne se sont fait connaître que des le second quart du xvire siècle, comme, par exemple, Quevedo, Calderon et Solïs. On ne peut -pas supposer non plus qu'écrivant après 1609 et vers 1632, il ait oublié aussi bien T'édition de 16og que les réimpressions de 161 3, r621 et 1623, et annoncé comme devant paraître très prochainement une édition de V Arte, qui eût été pour lui la première. Reste donc que Montalban a eu en vue un tratado de Lope, encore inédit en 163 2, et dont nous ne savons rien que ce qu'il nous en dit. Avis aux cherrheurs. » (Arte nuevo, Bulletin Hispanique de iyo 7)].
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velle. Au lieu du cavalier castillan, aux moustaches ̃retïbjassées et à la faconde pompeuse, qu'on s'attend à voir prendre la défense des jeunes et terrasser les vieux préj,ugés, c'est uni docteur en robe longue .qui, timide naoat -et en s'inclinani devant Aristote 'et la compagnie, plaide les cela est visible, se sent mal à l'aise il n'a pas devant lui tes banquettes des théâtres de iMaddd, mais un auditoire de beaux esprits, qui représentent la .kauite cukore littéraire de l'Espagne, et derriièresant le ¡fond de l'Italie et la France, dont il ne voudrai:! pas mériter. le dédaiia. Ou a prétende que Lope 's'était ici joué des doctes et qu'à ie bien eiateandre son est, en une forme ironique, l'apologie détournée de la romedia. Rien de moins vrai: l'auteur pade .sérieusemient, et le jugement «qu'il porte :su.r le théâtre espagnol de son temps est parfaitement sincère. Lope, il faut bien qu'on le sadhe, îi'a jamais ^terra le théâtre pour un art supérieur, un genre noble, il ne l'a jamais élevé au niveau des autres genres de poésie, il a toujours professé pour ses poèmes épiques et lyriques une beau coup plus grande estime que pour ses œmedias. Le
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ton de ce discours n'a donc rien en soi d'étrange, il est celui de toutes les préfaces lardées de citations latines et italiennes, encombrées de dissertations pédantesques à l'usage des fins lettrés, que Lope a mises à tous ses poèmes et à quelques-uns de ses drames;, et où le poète abondant, gracieux et facile disparaît sous le critique, le puriste et le précieux: L'Arte nuevo a le mérite d'être court, malheureusement il est écrit en vers blancs, forme dont ne s'accommodait guère le talent de l'auteur, qui avait besoin du cliquetis de la rime ou de l'assonance pour se produire agréablement le style en est lourd et gêné x. Pour le fond, c'est plus que ne promet le titre, plus qu'un traité de la comedia, c'est un art dramatique, une dramaturgie, comme on dit depuis Lessing. On peut, malgré le désordre de la composition, y distinguer trois parties un résumé des règles de la comédie et de la tragédie anciennes, d'après les docteurs de l'époque; un- aperçu très i C'est aussi à ce que je vois l'opinion de Luzan, homme de goût et de bon sens « Dexando aparte la negligencia y poca lima con que esta escrito y la cantidad de malas versos que tiene » (La Poètica, t. II, p. 63).
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écourté de l'histoire du théâtre national ou barbare, comme le nomme le poète; puis, pour finir, et'c'est le point essentiel, une théorie de l'art Jiouveau, une série de préceptes touchant les divisions, la versification et le style de la comedia. Laissons les généralités, les considérations sur l'art des anciens. Aussi bien croyons-nous volontiers Lope sur parole lorsqu'il nous dit qu'avant l'âge de dix ans il avait déjà repassé les poétiques; il s'agit, ne l'oublions pas, d'un sujet singulièrement précoce, et quand il aurait exagéré, peu importe il savait certainement tout ce qu'homme de son temps pouvait savoir, qui avait passé par Salamanque ou Alcalâ et avait lu les commentateurs italiens d'Aristote 1.
Mais s'il connaît les règles, pourquoi ne les observe-t-il pas? Pourquoi, lorsqu'il se met à composer, son premier soin est-il de les « enfermer sous triple serrure, d'enlever Plaute et Térence de son cabinet pour ne pas entendre leurs lamentations » ? i. L'Aristote de Lope est celui de Francesco Robortello d'Udine, auteur d'un commentaire de la Poétique et d'une Explicatio de comoedice. Notre Corneille aussi se réclame de l'autorité de cet Italien du xvie siècle.
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Pourquoi ? C'est que le public, qui est ici la masse des illettrés, le, vulgo, a:])eràul& notion.de ces choses des barbares sont venus qui ont gâté son goût, l'ont habitué à des rudesses, auxquelles il faut maintenant sacrifier, sous peine d'encourir sa disgrâce. « Parlonslui donc le langage des sots pour lui plaire, puisqu'il nous paye, »)Sur ¡ces corrupteurs du goût, Lope ne s'explique pas, il oublie de nous les désigner. Le seul auteur antérieur à son temps qu'il nomme est Loupe de Rueda, le batteur d'or de Séville, qui, comme Molière, composait et jouait ses pièces, et pour le louer d'avoir observé la distinction du comique et du tragique, d'avoir écrit, de vraies comédies, où l'action reste humble et plébéienne. Malheureusement il est descendu trop bas, et ici le noble Lope, l'hidalgo de la Montagne, se révolte. Comment Rueda a été jusqu'à introduire sur la scène des artisans^ (jnecànicos oficios), l'amour de la fille d'un forgeron Cela n'est pas ¡tolérable, aussi ses comédies se sont-elles noyées dans la farce, on les nomme maintenant intermèdes (enthmeses) l « l'art s'est i. Conformément à ce qui est dit ici de la manière ancienne de Rueda, un poète du xvif siècle, grand admirateur de Lope,
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dégradé par bassesse de style. » Puis d'autres ont mêlé les genres, « mis le roi dans la comédie ». Encore ici Lope ne cite personne, et pourtant il est des noms qui s'imposaient, celui de Juan de la Cueva, entre autres mais ce poète vivait et Lope a toujours été très attentif à ménager le prochain, un peu sans doute pour en être payé de retour
Solas Barbadillo, a dénommé comedias antiguas les intermèdes qu'il a composés. Dans ses Coronas del Parnaso y platos de las Musas (Madrid, 1635), la partie des entremeses s'annonce ainsi « -Quatre) antiguas, que el vulgo de Rspana llama entremeses: Comedia antigua, par opposition à la comedia nueva de Lope et son école. C'est donc à tort que M. Menéndez Pelayo (Historia de las ideas estéticas en Espaiïa, t. II, p. 442) pense que Salas Barbadillo, lorsqu'il dit quelque part qu'il a voulu « observar del todo aquello que no fuesse aspero ni desapacible para el siglo que corre », fasse allusion à l'art des anciens, l'art classique par artt antiguo, comme par comedia il entend la vieille manière espagnole, celle de Rueda, celle aussi des Célestines
;u. En ce qui concerne Jean de la Cueva, on ne voit pas très bien si Lope a évité de le nommer, considérant les tragicomédies de cet auteur comme une faute envers l'art, ou si, au contraire, il n'a pas voulu lui faire, en le citant, l'honneur de cette innovation, payant par cette omission le silence presque injurieux de la Cueva, qui dans son Egemplar poêlico (achevé de composer en 1606, mais non imprimé) n'avait pas dit un mot de Lope.
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Quoi qu'il en soit, un fait se dégage de ce passage la corruption du goût, c'est-à-dire, selon notre auteur, la confusion des genres, que l'école avait enfermé dans d'étroites limites, était fait accompli au moment de l'avènement de Lope. Impossible de remonter le courant. Que restait-il à tenter ? Des améliorations de détail, mettre un peu d'ordre dans ce désordre, et c'est à quoi Lope consacre la dernière partie de son discours.
Il est entendu d'abord qu'on renoncera à séparer le tragique du comique, une telle affectation de purisme serait maintenant déplacée. Ainsi Sénèque et Térence, mis aux prises dans un même drame, en rendront une partie sérieuse, l'autre plaisante cette variété plaît beaucoup, et la nature nous enseigne à combiner le gai et le sévère. L'unité d'action est indispensable point d'épisodes qui en troublent le déve- loppement et lassent l'attention du spectateur. Quant à l'unité de temps, le fameux tour de soleil ne peut Il est remarquable aussi que le nom de la Cueva ne figure pas dans le Laurel d.e Apoh, où défilent, comme on sait, à peu prés tous les ingenios d'Espagne, depuis les vraiment grands jusqu'au plus menu fretin.
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plus être observé. Il suffit que l'action marche aussi vite que possible, et si le poète a choisi une histoire qui doit durer plusieurs années, ou s'il est contraint de transporter d'un lieu dans un autre tel personnage, qu'il fasse en sorte que ces laps de temps s'écoulent et que ces déplacements se produisent dans l'intervatle des actes. Combiner les incidents de la fable de façon que l'action s'accomplisse en une journée, il n'y faut point songer. Nos Espagnols, dit Lope, ne s'en arrangeraient pas « Une fois assis au spectacle, ils veulent qu'en deux heures vous leur représentiez une histoire qui-commence avec la Genèse et aboutit au Jugement dernier 1. »
Le sujet trouvé, l'auteur l'écrira d'abord en prose il le divisera en trois actes, essayant, si possible, de les renfermer chacun dans l'espace d'un jour. Jadis la comedia avait quatre actes, elle était alors dans son enfance, et, comme les enfants, marchait à quatre pattes 2 mais en vieillissant elle en a perdu un, et i. Lope ne parle pas du tout eN l'unité de lieu, mais, en revanche, il recommande quelque part de laisser le moins possible la scène vide.
2. Et Lope ajoute qu'il lui arriva aussi, « à l'âge de onze ou
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c'est au capitaine Virues> auteur de la seconde moitié du xvie siècle, que Lope attribue cette réforme, ne prévoyant pas que d'autres, et par exemple Cervantes, en revendiqueraient l'honneur, si honneur il y a.1. Des conseils touchant la composition du drame et la conduite de l'action, je n'en retiendrai qu'un, parce qu'il est caractéristique et qu'il marque qu'en un point la comedia espagnole marche de concert avec notre tragédie française. Il s'agit de la suspension de l'intérêt. Un peu hésitant sur le moment précis où il convient que l'action se noue, il recommande à douze ans n, de composer des cowédias en quatre actes. Cette division, qui succédait à la, forme classique des cinq actes conservée par Torres Naharro, est celle de Juan de. la Cueva, qui s'en déclare l'initiaiteur (el un acto de cinco le be qiiitadd), de même qu'il prétend avoir le premier introduit sur la scène comique « des rois et des divinités ».
i. On sait, depuis Moratin, que le premier Espagnol qui ait eu l'idée de la division en trois actes est un nommé Francisco de Avendano, auteur d'une comedia imprimée en 1553. Cervantes, lui, s'est vanté à deux reprises (préface de ses Comedias et prologue du Rufian dichoso) d'avoir « réduit à trois les cinq actes » de l'ancienne comédie; mais il oublie la première réduction de Jean de la Cueva, et il oublie que lui-même a composé en quatre actes sa Numancia.
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deux reprises, et de la façon la plus pressante, de ne laisser entrevoir sous aucun prétexte l'issue du drame, de retarder le dénouement jusqu'au milieu au moins du dernier acte. Le public, prévenu trop tôt de la solution du problème, se désintéresse de la pièce et n'éprouve nulle envie d'en entendre plus long.. Il tourne le dos à la scène et prend la porte'. Sur cette bande étroite de terrain, le théâtre espagnol, ai-je dit, tend la main au nôtre tous deux ont voulu i « Suspendre l'intérêt » l'expression revient souvent chez 'les auteurs espagnols de cette époque. « La suspension basta el fin. Que conocer al principio Los sucesos del fin della (de la comedia). Ni es de mano artificiosa Ni es de obra de ingenio llena » (Rorzrcurace d un licendaào que deseaba hacet- comedias, par Carlos Boil, dans Norte de h poesia espanola, Valence, 1616); et José Pellicer loue Perez de Montalban d'avoir'su « tenir le public indifférent et neutre jusqu'à la seconde scène du troisième acte, qui est le moment où il commençait à débrouiller le labyrinthe » (Idea de la comedia de Castiller, dans Lagrimas panegiricas A la temprana muerte del gran poêla. D°r Juan Pere\ cle Montalban, Madrid, 1639). Ce Montalban lui-même, dans le prologue du tome premier de ses Gomedias' (Alcala, 16,8), observe qu'au théâtre « la. tournure de la dame, la prestance du premier rôle la cadence des mots, la musique des rimes et la suspension des sentiments (afectos) trompent les oreilles les plus attentives » et font passer sur bien des défauts de pensée et dë style.
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que l'intérêt fût adroitement suspendu et que la curiosité du spectateur ne reçût entière satisfaction qu'au moment même de la catastrophe.
Après la composition', l'élocution. Dépouillé de .lieux communs sur les convenances que doit observer le poète, ce passage se réduit à quelques règles sur l'emploi de la versification et des figures de mots et de pensées. Nous avons vu que Lope conseille de rédiger d'abord en prose comme une ébauche de la comedias. Lui-même, qui rimait avec une aisance restée proverbiale, qui pensait presque en vers, se pliait-il à cette exigence ? J'en doute, et tout ce qu'on sait de la façon de composer des poète dramatiques du xvne siècle, tout ce qu'on surprend de leur travail intime dans les manuscrits qu'ils ont laissés, prouve, si je ne me trompe, que chez eux l'inspiration revêtait immédiatement la forme du rythme. D'ailleurs, qu'un premier jet en prose soit ou non le point de départ, c'est au vers qu'il faut aboutir. Toute comedias, dès la fin du xme siècle, est vèrsifiée d'exception à la règle, il n'en existe point, mais toutes ne le sont pas de la même manière, ou plutôt, comme la, variété est le trait distinctif de cette
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versification, il en résulterait que, suivant les époques, tel genre de vers ou de strophe a joui de plus ou moins de faveur, et que les caprices de la mode ont fait dévier les poètes des préceptes que voici de leur chef de file « Les plaintes, dit-il, s'expriment bien en dizains, le sonnet convient à celui qui attend (le monologue), les récits réclament la romance, quoiqu'ils produisent en octaves un bel effèt, les tercets se prêtent aux pensées graves et les quatrains aux amours. » -Lope omet ici plusieurs combinaisons rythmiques dont il a fait souvent un très heureux usage', mais,.ce qu'il énumère est bien, en effet, l'essentiel, et non seulement les dramaturges venus à sa suite n'ont rien ajouté à ce fonds, mais ils l'ont notablement diminué; la versification de Calderon, par exemple, est beaucoup moins variée que celle de son grand prédécesseur. Parmi les figures que recommande Lope, il en est une que je dois signaler, c'est le « parler équivoque ou ambigu » qui, ajoute-t-il, « réussit si bien auprès du vulgo, car chacun croit i La lira, strophe de cinq ou six vers, la silva, combinaison libre de vers de onze et de sept syllabes généralement à rimes plates, etc.
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qu'il est seul à comprendre ce que dit l'acteur La recommandation, j'en conviens, ne va pas sans une pointe d:'ironie, mais la. simple mention de ce pauvre artifice montre assez l'importance qu'y attachaient et les auteurs et le public, et quels ravages il causait déjà dans le style de la comedià.
Et quand Lope a épuisé la rhétorique, son discours est fini. ou à peu près. Quelques avis encore sur la dimension du nouveau drame, quatre. cahiers (pliegos) par acte, en tout douze, c'est la bonne mesure 1 puis sur le costume des acteurs, i Douze pliegos,, c'est-à-dire quarante-huit feuillets, du format in-quarto moyen, le pliego (nommé aussi duerno) se composant de quatre feui! ,tts. Lope parle ailleurs (Peregrino en su patria, éd. de 1618) « de cinquante hojas », ce qui revient à peu près au même. Douze cahiers ou quarante-huit feuillets, c'est en effet, depuis Lope, la dimension régulière et constante de la coiuedia. Quevedo, dans sa fantaisie. satirique intitulée El entretenido, lu dtteiïa j)' el soplon,{ùx dire au poeki de los picaros « Esta mejor ocupado un ingenio en gastar doct pliegos de papel de entra das y salidas y maranas para casar un lacayo sin amonestaciones ? (Ed. Fernandez-Guerra, 1. 1, p. 372). Lorsque Lope et Montalban, qui collaboraient ensemble à la Tercera orden de San Fraatcisco, durent, pressés par le temps (ils avaient en tout trois jours pour écrire la comedias et la faire répéter), se partager le troisième acte, « chacun de nous, dit Montalban, écrivit ses huit feuillets » l'acte
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qui doit être approprié à leurs rôles « ne mettez point de col au Turc ni de hatits-de-chausses aux Romains ». Après quoi Lope tire sa révérence aux académiciens; mais en les quittant, il ne résiste pas à l'envie de lés railler doucement, comme pour se venger devoir été mis sur la sellette et contraint de confesser ses péchés envers l'art, qu'il respectait comme eux, qu'il ne violait vraiment qu'à son corps entier en avait donc seize et les trois quarante-huit. Une comedia. qui dépasse le nombre traditionnel de douze cahiers est tenue pour longue « Considéré el auditorio que si con estos versos continuaba el referir una larga comedia de quince pliegos, que seria darles a cada uno un tabardillo. » (Castillo Solorzano, La Gar- duna de Sewillca, éd. Rivadeneyra, p. 233.) Ces douze cahiers s'entendent non du texte imprimé, mais du texte écrit, et en effet tel est généralement le volume des manuscrits de comedias que conservent nos bibliothèques. Traduite en lettres de forme, la comedias ne couvrait plus guère qu'une vingtaine de feuillets Perez de Montalban se plaint des imprimeurs qui, « pour économiser le' papier, la mettent en quatre pliegos, quand il lui en faudrait, huit. » (Prologue de ses Comedias, Alcala, 1638.) [« Por el ahorro del papel aun no cabales (pues donde acaba el pliego acaba la jornada, y donde acaba el cuaderno acaba la comedia. » (Cuarta parte de Calderon). « nueve pliegos de coplillas », dans Suarez de Figueroa, Pla^a iiniversal de lodas las ciencias y artes, Madrid, 161 5, p. 323].
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défendant. « Oui, s'écria-t-il, je suis un barbare; que l'Italie et la France me taxent d'ignorant, j'y consens, mais qu'y puis-je faire ? Si, avec celle que je viens d'achever cette semaine, j'ai déjà composé quatre cent quatre-vingt-trois comedias, qui, toutes, excepté six, ont gravement'péché contre l'art. » Excepté six Depuis 1608, des académiciens cherchent ces six comedias et ne les trouvent point. C'est peut-être bien qu'elles n'ont jamais existé.
De ce que l'Arte nuevo finit par une boutade, il n'en faudrait pas conclure, je le répète, que les déclarations de Lope sur la barbarie de son théâtre fussent le moins du monde affectées. Sans doute, il ne pouvait pas faire entièrement abstraction de ses titres de dramaturge adoré de la foule et de maître incontesté de la scène nationale, cinq cents drames sont un bagage assez compromettant et dont ne se débarrasse pas qui 'veut. Peut-être aussi pressentait-il déjà que son œuvre dramatique serait un jour sa vraie gloire et préserverait mieux son nom dans la postérité que sa Jérusalem coraquise, son panégyrique de saint Isidore, patron de Madrid, ou La Beauté d'Angélique; mais tout autant que les académiciens,
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Lope était convaincu de l'infériorité de la comedia comparée aux autres formes de la littérature sérieuse. « Affaire de pur métier l'art n'est pas en cause ici nous ne pensons qu'à contenter le parterre. » Voilà ce qu'il répète sur tous les tons et dans son discours et ailleurs. Il faut voir comme il se fait petit quand il s'adresse aux lettrés, aux inzgenios cientificos l 1. Le cientifico, selon Lope, est l'homme qui a fait ses humanités, qui s'est, pour parler à l'espagnole, baigné dans les eaux du Termes ou du Henares, qui a passé par les grands collèges ou l'université. Ainsi Cervantes n'était pas un cieniifico, et. Lope le lui a fait entendre (Prologue de sa nouvelle Las fortimas de Diana), il n'était qu'un simple lego (Meus'). Ces lettrés de culture latine (ou italienne), Ricardio de Turia, dans son Apologie des comedias, les nomme « les mécontents, secte de beaux esprits, qui prouvent la supériorité de leur doctrine et de leur talent en recevant avec des nausées tout ce qui a le malheur de s'offrir à leur censure. » C'est évidemment en réponse aux jugements dédaigneux de ces humanistes que le philistin, quoique docteur, Juan Perez de Montalban (celui que Quevedo nommait plaisamment retacillo de Lope de Veça) a qualifié quelque part la comedia de « nobilissimo y cientifico arte » (Memoria de los que escriveti comedias en Castilla, article de Mira de Amescua). [« Foras tero. Algunos doctos y cortesanos habra tambien, que agradezean los poetas sus estudios, con diferencia de los buenos à los no tales, de los legos à los cientificos », etc. (Lope, Parte XVI, 1622) Dialogue-préface entre un Forastero et le Théâtr e « V
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comme il les nomme. En dédiant au duc d'Alcalâ, un antiquaire andalou^ son drame intitulé Lo cierto por la dudoso, il dira qu il a choisi quelque fruit rustique de son humble vega pour l'offrir à un si haut personnage, et que puisqu'il est bien entendu qu'en Espagne les comedias n'observent pas de règles, il ose compter sur son indulgence. Au fameux cavalier Marina le Gongora d'Italie, il, a soin de faire obser-. ver qu' « en Espagne on ne respecte pas l'art; non pas par ignorance, car les fondateurs du théâtre natiopues con perversas coplas, que ellos (los autores) hacen, quieren quitar el nombre à los poetas dtntificos, hurtando lo que no saben, no hagan vanas quimeras de injustas quejas » (Préface de Lope Parte XVII, 1622), « Los poetas que los escriben (las comedias) con erudicion, aunque pocos, puesta que no siempre agradan al vulgo, son di;nos de estimacion pero los legvs ignorantes, aunque alguna vez le agraden y contenten hablandole en su lengua, no aspiren a mas fama que las medicos empericos que curan sin arte » (Prologue de la Parte XIII). « Y porque en Espana no tienen préceptes (las comedias) no ofendera su grave juicio en todo genero de letras, asi la disposicion de su contexto, como el ornato de sus versos, que en esta ocasion tanto temor poneâ todo ingénia cientijko que i los vulgares en qualquiera calidad, no hay que tener respeto » (Dédicace à D. Fernando Afan de Ribera, duc d'Alcalâ, de Lo cierlo pour lo ihidoso, de Lope de Vega).]
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nal, Rueda et Naharro, Font gardé, mais par la faute de ceux qui leur ont succédé ». Dans l'amusant dialogue entre le Théâtre et le Poète, qui ouvre la XIXe partie de ses Comedias, Lope -fait dire au Théâtre: « Qu'est-ce donc ? Allez-vous disputer avec Scaliger de la division et des parties de la cornedia} A quoi le Poète répond que les Espagnols n'ont cure de cela et que pour lui il est bien décidé à s'en remettre sur ces questions « au licencié Ironie' de Conculcabis dans le livre futur qu'il doit imprimer à Rome. Et que dit ce livre ? demande le Théâtre. Jusqu'à présent il n'a rien dit A plusieurs reprises aussi Lope proteste qu'il n'a point écrit ses comedias pour être imprimées, « pour que des oreilles du théâtre elles passassent à la critique du cabinet 2 ». Et quelle distance ne met-il pas entre cette littérature de pacotille et ses oeuvres cientificas Au docteur Gregorio Lopez de Madera, en lui envoyant son Arcadia « De ces comedias, j'en ai 1. Dédicace de Virtuel, y mujer (Parte XX, Madrid, 1625).
2. Par exemple dans le prologue de la Parte IX (Madrid, 1618).
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beaucoup écrites, car dès un âge fort tendre je me suis senti une disposition particulière pour ce genre de poésie, ce qui ne m'a pas empêché d'emprunter aux Muses un style plus sublime, que j'ai souvent employé dans des œuvres sérieuses » Il confie encore à un évêque de Guadix que si les lettres trouvaient en Espagne une protection- efficace « il aurait essayé quelque chose de plus digne de la renommée, mais que voyant le plus grand nombre prendre le chemin du théâtre, il a préféré les applaudissements qui enrichissent à une réputation peu sûre 2 ».
Là médiocre importance qu'il semble attacher à son rôle de réformateur du théâtre, d'inventeur de la comedia nueva est remarquable. Dans son Arte nuevo il ne réclame rien, il a suivi le courant, voilà tout. Plus tard, lorsque son nom est dans toutes les bouches, que les directeurs de théâtre s'arrachent ses pièces, ses prétentions ne s'élèvent guère. Lisons le prologue de la XIVe partie de sa collection dramai. Parte XLII, Madrid, 1620.
2. « He seguido con mas gusto el agradecimiento prove- choso que la opinion dudosa » (Parti XVII, Madrid, 1622).
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tique, datée de 1620. Le Théâtre porte la parole « Voici, dit-il, la XIVe partie des comedias qui ont été représentées sur mes planches et qui sont de l'auteur auquel je dois, sinon mes commencements, au moins mes progrès dans ia langue d'Espagne, de celui qui a frayé la route aux autres talents rares qui Font suivi et dont on peut espérer de plus grandes choses encore, car il est devenu si facile d'écrire des comedias, j'entends de celles qui sont hors V art y que les entrepreneurs ne peuvent se délivrer de la persécution des poètes. » Et l'année suivante, en 1 621, ce même théâtre; parlant pour Lope au prologue de la XVe partie, déclare que « l'auteur ne cherche point à se singulariser ni à. nier le mérite des autres, il ne leur demande nulle reconnaissance pour avoir habillé la comedia de l'habit qu'elle porte maintenant, car ayant, comme il a, assez de littérature pour se faire lire en Italie et en France, peu lui importent ces fleurs sauvages, etc. ».
Ce n'est vraiment que sur le déclin de sa carrière, revenu de quelques illusions et meilleur juge de son œuvre immense, qu'il se sent pris d'une sorte de tendresse quasi posthume pour ces drames barbares,
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tette littérature subalterne et de rapport qu'il avait si longtemps dédaignée. Témoin des progrès étonnants du théâtre, de la vogue extraordinaire des wmedim, Lope fait, non sans quelque amertume, un retour sur lui-même, il laisse échapper comme des regrets, une protestation à mots un peu couverts: « Et pourtant c'est moi qui. » L'églogue à Claudio, une des dernières œuvres du poète, composée vers 1632, trois ans avant sa mort, trahit bien cet. état d'esprit. Tout le bagage du poète y est passé en revue et discuté, le théâtre vient à son rang, le dernier. « Si maintenant, Claudio, j'énumère le nombre infini de mes fables dramatiques {fabulas cômicas), tu te refuseras à croire à tant de papier noirci, tant d'imitations, tant de fleurs parées en couleurs de rhétorique. Je t'en offre quinze cents, dont plus de cent ont passé en moins de vingt-quatre heures de Inti muse au théâtre. C'est à moi que l'art de la comeâia doit ses commencements, quoique je me sois écarte des rigueurs de Térence et que je ne prétende pas nier la part qui revient aux trois ou quatre grands esprits qui ont vu l'enfance du théâtre. ? Et après avoir décrit les personnes, les conditions, les cacac-
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tères qu'il a portés smr la scène :I, il termnine en s'écriant encore « A qui doit-on, Claudio, tamt -à& définitions de la. jalousie et de l'amour ? A qui tant de mouvements de rame ? A qui autant .de que la rhétorique en a pu inventer? Au jourd'hmi &m ne fait plus qu'imiter ce que le talent a créé hier :le chemin est ouvert, tout le monde s'y pousse » Qm v^oit 'la distance parcourue depuis YArte numo^ ou i?l ne s'accordait pour ainsi dire rien, le't les dédicaces, !les ¡prologues où il traitait les cmnedias es. fleurs sauvages que le hasard a' tait éclore. Les ans sont venus et le vieillard s'aperçoit qu'il pourrait payer cher ces airs de dédain pour la partie populaire de son œuvre d'autres se parant déjà de ses plumes, ail 1. La varieté des personnes et 1a copie fidèle de leurs aU'ures {/sartcuat celles des classes inférieur.es), voilà ce qui étonnait et charmait les contemporains de Lope. « La introducion de las personas graves en Lope y et decoro, por la mayor parte, es singular, y singularissima la de las personas humildes. Todas las vezes -'(y son casi inumeràbles) *que jntroduxo villanos de todos ofrcios, no puso figuras <en el tablado, sino lospropios villanos » (Prologue de la Pur te XXIII, posthume, Madrid, 1638). 2. Egloga à Claudio, dans. les 9bras sleeltas de Lope, t. IX, p. 355 et suiv.
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se souvient du sic vos non vobis. Pour la postérité, à qui il songe ici plutôt qu'à ses contemporains, il veut marquer sa place, dire une fois, sans zèle ni colère, mais avec pleine conviction, ce qu'il a donné de son génie à la comedia et ce que les autres lui ont emprunté.
De ces divers aveux du poète et de ce que nous savons d'ailleurs de l'histoire du théâtre en Espagne, la conclusion est facile à tirer. Lope, à la fin du xvie siècle, a reçu de ses prédécesseurs un drame mal agencé, de genre composite, de forme hésitante, tantôt divisé en quatre actes, tantôt en trois, drame diversifié, mais où la répartition des rythmes était trop abandonnée au caprice des auteurs. Ce drame, il l'a adopté tel quel, parce que le public espagnol y avait pris goût, mais d'embarrassé et d'inerte qu'il était, il lui a donné de la vie et de l'équilibre. Le cadre en était étroit, n'admettait qu'un nombre restreint de sujets il l'a extraordinairement élargi, il y .a introduit tout ce qui pouvait fournir matière à situations dramatiques, la Bible et là mythologie, les vies des saints et l'histoire ancienne, les chroniques et les légendes du moyen âge, les nouvelles des Italiens,
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les événements contemporains, la vie espagnole au xvne siècle. Avant lui les moeurs, les conditions des personnes et les caractères étaient à peine esquissés il a mieux observé et mieux décrit, il a créé des types et prêté à chaque espèce sociale le langage et les allures qui lui sont propres; il a, autant que cela était dans ses moyens et que le lui permettait l'extrême rapidité avec laquelle il composait, dessiné quelques caractères. L'ancienne comedia versifiait .assez pauvrement et gauchement il a réglé l'emploi de tous les rythmes de la poésie nationale, depuis les vieux couplets des romances jusqu'aux combinaisons les plus rares des genres lyriques empruntés aux Italiens. Voilà l'oeuvre de Lope; telle qu'elle est, elle suffit amplement à sa gloire.
Mais n'écoutons pas que celui qui est juge en sa partie, interrogeons les autres, les contemporains et les émules. Il y a, dans la littérature. de l'époque, deux partis en présence, celui des critiques, des cienti ficos, des pédants de collège, qui méprisent les comedias, et il y a celui des poètes populaires, des laics (legos), comme on disait alors, qui se moquent des règles et, à défaut d'études, se contentent des
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ressources; de leur ifmagitT&tioïi. Tous suint; d'accord!, tous: tiennent Lope pour un initiateur,, un chef d'école aux premiers ils apparaît comme le grand coupable, le: coEimpîeuiir par excellence: de la poésie éranaatique; porar les secondes c'est un ci Apolknns en personneUne telle unanimité d'appréciastio,m est surtout remarquable chez ceux-ci, chez les rivaux, q:ui:, par jalousie de métier,, amuraient pu contester les titres de Lope et le rabaisser.. Aucun d'eux iae: l'a: fait,, aucrarfè note discordante ne s'est élevée dams leur grand concert d'éloges. Cervantes luimême, blessé dans son annio-iar-propre d'auteur drama>tdq!U;e que le public a. délaissé et qiui dans un passage célièbire (qia'a imité notre Boileau J) a sans ménaDoit Quixote, part. I,. ch. 48. « Qué mayor disparate puede ser, en eï sujeto que rratamos, que salir un nïno en mantïlîas eu liv primeva. escena àelpvvmer acto, y erv la segimd'a salir ya hecho hombr.e. baj'bada ? »-De là les vers de. ÏArt poétique « Là, souvent le héros d'un spectacle grossier, Enfant au premier acte, est barbor. ait dernier. Le premier auteur qui ait fait ce rapprochement m'e semble être Martinez de la? Rosa (Garas liter arias, édit. de Paris, 184 j, p.. 212) et ce critique nous apprend encore queCervantes n'a pas inventé cet enfant et ce barbon, car on retrouve la même idée et la mëme expression dans un livre du xvic siècle, X-xFilosophia ̃ antiguapoétfciv, de-Lopes: Pïhciano; p*. rgo.
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gement mis à nu les vices de la comedia nueva, s'incline devant l'idole toutes les fois qu'il la rencontre sur son chemin c'est de. lui qu'est le mot devenu classique de « monstre de la nature », si souvent appliqué à Lope et dans le sens le plus favorable 1. Les autres ne tarissent pas Lope est l' « honneur du Manzanares, le Cicéron de Castille, le phénix de notre nation 2 », il est le « prodigieux monstre espagnol, un nouveau tostado envers il est l' « Adam » de la comedia 4. Parmi ceux mêmes qui avaient le plus de droit de faire valoir leur part de collaboration l'oeuvre nouvelle, je veux parler des poètes de Valence, des Guillen de Castro, des Aguilar, des Tarrega, il n'en est aucun qui refuse de rendre hommage au maître. <c Prince des poètes dramatiques de notre temps et même des temps passés », le nommé Ricardo de Turia 5, et Guillen de Castro répète, ou 1. Prologue des Corrrecliacs de Cervantes (161 j).
2. Tirso de Molina, Cigarrahs de Toledo, éd. de Barcelone, 163 1, f. 70.
3. Velez de Guevara, El dil7blo coxnelo, éd. Rivadeneyra, p. 29 b.
4. Enriquez Gomez, Prologue du Satnsou Nn^areno dans La Barrera, Catdlogo, p. 135.
5. Apologètico de las comedias espanolas.
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trouve de son côté le mot de Cervantes, « monstre de la nature Il serait difficile, on le voit, de rencontrer dans l'histoire un poète qui, de son vivant déjà, ait joui d'une plus complète apothéose.
Reste maintenant à savoir si le drame nouveau, la comedia de Lope, a mérité la fortune extraordinaire qu'il a obtenue dans son pays d'origine, la réputation immense que lui a faite la complicité des poètes populaires et du vulgo d'Espagne. Autrement parlant, le théâtre espagnol, tel que l'ont façonné Lope et ses disciples, occupe-t-il dans la littérature moderne un poste d'honneur à côté de notre tragédie et de notre comédie, à côté de Shakspeare, ou, s'il ne l'occupe pas; quels motifs l'ont empêché de le prendre ?
Il faut tout. dire en un mot. La comedia, œuvre grande tant qu'on la considère en soi et ne la sort pas de son milieu; perd singulièrement de son importance sitôt qu'on l'introduit dans l'enceinte de la littérature générale et qu'on la compare à d'autres productions du même ordre. Quel genre d'intérêt i Dans le Curioso impertinente, publié pour la première fois en 1621.
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excite aujourd'hui chez les lettrés français, anglais, allemands ou italiens le théâtre espagnol du XVIIe siècle ? Un intérêt de curiosité, rien de plus. Et l'on peut affirmer que si cette comedia n'avait pas, en un temps, cédé quelques parties de ses richesses, j'entends de ses sujets, à d'autres théâtres européens, nous imposant ainsi la tâche de l'étudier, non pas pour elle-même, mais pour ce qu'elle a suscité au dehors, bien peu, même parmi les dénicheurs de choses rares, les amateurs d'étrangetés, prendraient la peine d'y jeter les yeux. Même à l'époque. de sa plus grande splendeur, alors que les circonstances politiques se prêtaient admirablement à la diffusion de la langue et de la littérature espagnoles, la comedia n'a jamais été acceptée et imitée comme l'a été pendant un siècle la tragédie française on n'y a vu qu'un répertoire de situations, un vaste magasin d'intrigues et de jeux de scènes, où il a paru longtemps commode de venir s'approvisionner. La forme de ce drame, ses divisions, ses rôles, ses emplois, son style et sa versification ont été totalement négligés en franchissant les Pyrénées, il a dû, pour nous plaire et plaire par nous aux autres nations, prendre l'habit à
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la française et; renoocer à son accoutrement de cabaIlero espagnole. Or, dans raie œuvre d'art, la forme c'est beaucoup,, c'est presque: tout. Si pour en rendre l'idée accessible, il est nécessaire de la dépouiller de son vêtement, de retrancher Les ornements 'qui, à l'origine, en faisatent le charme, ornements jugés essentiels par ceux qui l'ont créée et qui Font les premiers applaudie, qu'en reste-t-il ? Peu de chose. Notre tragédie, au contraire, a passé nos frontières intacte, avec ses sujets; ses procédés de composition, ses confidents, ses récits et son vers. Fond et forme, on nous a tout pris tandis que le drame espagnol a du subir, pour être. reçu chez les autres, une m.étamorphose complète, et c'est seulement au prix du sacrifice considérable de ses plumes et de ses rubans qu' « il a réussi à faire quelque figure sur le grand théâtre du monde ».
D'où vient cela, et à quelles causes rapporter cettedépréciation au dehors d'une œuvre si prisée et si prônée au dedans ? J'en trouve plusieurs. Il en est qui tiennent même à la nature de ce drame, à la direction que lui a imprimée son inventeur, et d'autres, plus générales, qui dépendent du tempérament de la race.
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Pour ce qui est des premières,, la transgression de la. règle des unités est-il besoin de le dire? nous, touche (on peuy et plus, iniéulgents que Lope luimême pour son théâtre, nous l'absolvons sans effort des libertés qxt'il a jugé nécessaire de prendre avec ces fameuses cam-ventieiiis. qu'il nomme Y art, conventions qui, à. coup sûr, out été souvent ta cause de grandes beautés, mais auxquelles nul ne reconnaît plus force; de loi.. De même la confusion des genres. ne nous choque guère, et je ne pense pas qu'il se trouve aujourd'hui personne pour la lui reprocher sétdeuseme®t. La critique qu'il y a lieu d'adresser à poète et à son école a une portée plus générale. le me suis efforcé déjà de mettre en évidence ce fait capital que la cowvdid, de par la volonté expresse du maître est de son aveu constant, n'a pas accès, au sanctuaire de la. haute littérature. Drame essentiellemeiit populaire l, conçu et écrit pour satisfaire la 1 L'expression est déjà dans Luzan, que je me plais à citer parce que les critiques espagnols de nos jours, qui sont loin de le valoir, affectent de le traiter de perruque Luzan donc a parfaitenaetat vu'que la Dramatisa' Espatiola se debe dividir en dos clases, unupopuâar, lihre, sin snjecion a: las reglas de los antiguos, que nacio, echo raices, crecio y se propage? increibleraente entre
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curiosité et les passions de la nation espagnole sans distinction de classe., qui n'exige du spectateur aucune préparation, aucune culture raffinée, qui n'aspire qu'aux applaudissements du parterre ignorant et grossier, et craint même d'être transporté des planches du théâtre sur les feuillets du livre, telle est la comedia dans l'esprit de Lope et de son entourage. Ce qui devait résulter de cette conception, admissible en soi d'ailleurs et que je n'entreprends ni dé blâmer ni de louer, est aisé à prévoir. Point de public lettré et délicat, partant point d'étude approfondie des caractères et des passions, point de composition, point de style. On ne peut pas contenter tout le monde, et qui veut attirer le vulgo doit lui plaire par des procédés à son usage. Malheureusement, un genre quel qu'il soit, s'il veut survivre à l'engouement momentané d'un milieu, ne saurait se passer de qualités de forme vraiment supérieures, et la comedia du xviie siècle, sauf de rares exceptions, s'en passe. Tous nosotros y otra que se puede llamar erudita porque solo tuvo aceptacion entre nombres instruidos » (La poética, t. II, p. s). Cette seconde espèce, la poésie érudite, ne compte, on le sait, aucune pièce représentable.
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ces auteurs, sachant à qui ils avaient affaire et le peu qu'ils avaient à ménager, produisaient beaucoup trop vite et produisaient beaucoup trop. Inutile de rappeler tant d'exemples d'improvisation au pied levé, de fabrication sur commande à la journée et à l'heure, tant de tours de force qui, hélas! ne sont point des tours de génie Les plus habiles devaient perdre à i. J'ai fait allusion plus haut à ce troisième acte de la Tercella orden de Scrn que se partagèrent Lope et Montalban pour aller plus vite. On était au soir, le directeur du théâtre de la Cruz se désespérait, il lui fallait absolument sa comedia pour le lendemain. Montalban resta à coucher chez Lope, et pour ne pas se laisser gagner de vitesse se leva à deux heures du matin à onze heures il avait terminé sa partie. Il sortit alors pour voir où en était son ami et fut bien surpris de trouver Lope dans son jardin en train d'examiner un oranger qui se gelait. « Et comment va notre comedia} A cinq heures, répondit Lope, j'ai commencé à écrire, et il y a une heure que mon acte est fini j'ai déjeuné d'une tranche de lard, j'ai composé une épître de cinquante tercets et j'ai arrosé tout ce jardin, ce qui ne m'a pas peu fatigué. » Puis tirant un rouleau de sa poche, il iut à Montalban sa partie d'acte et les tercets (Famz postuma de Lope, Ohras sueltas, t. XX, p. 52). Une autre fois, Lope renonce à composer une comedia sur la fête du Rosaire, parce qu'il n'avait pas trouvé le sujet à son goût « Faites-la faire au vol (mande que se escriba al vuela), écrit-il alors au comte de Lemos, comme celle que j'ai composée sur l'Immaculée Conception à la demande
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cette pra.tiqo.ie leurs qualités les plus heureuses, y ënKDusser fa pointe de leur talent. Premier défaut grave, première cause d'infériorité.
A cette absence d'analyse et d'étude des mouvements de rame et des traits de (caractère, à ia faiblessé ¡de la composïtèoii et du s tyle s'ajoute rem- de l'Université de Salamanque et qui a obtenu un si grand succès -» (Qbras suellas, t.. XVII, p. 402). Et je ne parle pas des corrzedicts de repente, impromptus académiques c'est encore un genre à part.
i. Par faiblesse du style, j'entends la platitude de l'expres- sion, cette lan,gue diffuse et sans vigueur, cette abondance brillame et pompeuse, mais si vide et si vague enfin, et plus souvent qu'on ne croit, l'incorrecti.on grammaticale. Du parler .hyperbolique et amplaigourique, gongorisme ou culilsme, qui exerça de terribles ravages dans la œ média comme ailleurs, de toutes les pointes de mauvais goût, il n'y a tro,p rien à dire .toute langue, toute nation ont eu leur phébus, et notre tragédie _si correcte, si haut chaussée, n'en est pas toujours libre. Sur ce point donc, les auteurs de comedias ne sont qu'à demi respon-'sables, contraints qu'ils étaient par métier de suivre une mode absurde. [Ou n'a pas assez pris garde à l'aphorisme de Baltasar Gracian, dans son Oraculo manual y arte de prudencia, Amsterdam, 1659, p. x&5 « Todo se les va a algunos en començar, y nada .acaban inventan, pero no prosiguen, instabilidad de genio, mmca consiguen .alabança, porque nada prosiguen, todo para en parar, si bien nace en otros de impaciencia dé animo, lâcha de Espaiioles, assi como la paciencia es ventajz de los Belgas.
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ploi d'une versification plus lyrique que dramatique et qu'on ne doit pas hésiter à qualifier de puérile, Je qu'une manière de drame, dira-t-on, et les genres me répugnent pas à être rapprochés dans une même oeuvre au point qu'une action dramatique ne puisse être soutenue d'une partie lyrique cet ornement parasite est souvent d'un grand effet, et les anciens nous en ont donné l'exemple. Et que reprochez-vous à sa variété de rythmes, serait-ce que vous teniez pour indispensable il un drame bien- conduit la monotonie de l'alexandrin ? Je réponds qu'il n'est certes pas inadmissible que dans le drarne, tel même que font conçu les modernes, et sans qu'il puisse être ici question de ressusciter ou d'imiter le chœur de la tragédie antique, une certaine forme de lyrisme ne trouve sa place. Ce n'est point là ce que je blâme. J'admets et les effusions lyriques et ces chants populaires si gracieux et si frais, dont Lope et Tirso ont tiré si bon parti, je les admets même quand La marche de l'action devrait en être, sinon gênée, retardée. Un vers unique n'est pas non plus essentiel, personne ne le prétend, et l'on peut dire tout le
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mal qu'on voudra de l'alexandrin majestueux et compassé, ainsi que de l'alternance monotone des rimes masculines et féminines mais au moins l'alexandrin n'est-il pas ridicule. Tandis qu'il est ridicule que les parties de l'action empruntent à la poésie lyrique ses strophes les moins appropriées au mouvement du drame. Qu'un monologue s'enferme dans les quatorze vers d'un sonnet, qu'un dialogue s'échange en cascades de rédondilles, ce qui équivaut pour nous à des couplets de chansonnette, voilà bien de quoi causer, surtout dans les pièces de caractère tragique, une impression directement opposée à celle que l'auteur entendait produire. Possible que les Espagnols en pensent autrement, mais leurs sentiments ils ne sont pas les maîtres de nous les faire partager, et il reste toujours que, passé les monts, cette versification d'opéra n'est pas facilement admise et porte à la comedia un préjudice considérable. Est-il bien sûr, d'ailleurs, que composition, style et versification du drame de Lope aient, en Espagne même,, victorieusement résisté aux atteintes du temps et aux changements du goût ? Si cela est, comment s'expliquer que nos voisins, qui ont cependant beaucoup
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retenu de la forme de leur théâtre classique, éprouvent le besoin d'arranger ou de refondre ce sont les termes consacrés les pièces du vieux répertoire, • quand il leur arrive (rarement) de les remettre à la scène £ ? Comment si la comedia n'a pas vieilli dans sa forme, des auteurs, et non des plus médiocres, réussissent-ils à gagner quelque renommée en fournissant les théâtres 2 d'aneglos de pièces de Lope et i. « Prueba concluyente de la exactitud de estas criticas negativas (il s'agit des jugements sévères portés par les écrivains du xviiïe siècle sur l'ancien théâtre), es que la mayor parte de las obras maestras de nuestro antiguo teatro no pueden presentarse hoy en la escena sin un arreglo prévio, que ha recibido el nombre por demas significativo de refuttdicion. Aplauso, y no ̃ < escaso, han merecido poetas contemporaneos por haber refundido obras del antiguo têatro es decir, por haber vaciado en moldes correctos un métal riquisimo, separando préviamente las escorias que lo afeaban. » Discacr-so leido ante la R. Espaiïola, por D. Manuel Silvela, le 25 mars 1871 Memorias de la Academia Espaiiola, t. III, p. 284.
2. Tout au commencement de ce siècle, l'arrangeur en titre était D. Candido Maria Trigueros, qui a refondu plusieurs drames de Lope et qui a eu la naïveté d'expliquer dans les préfaces le pourquoi de ses remaniements. Rien n'est comique comme de le voir aux prises avec une de ces anciennes pièces qu'il s'efforce de réduire à la formule française des trois unités et des cinq actes,
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de Calderon ? Et nul ne se lève pour protester et crier au sacrilège. Que diriez-vous pourtant si, venant à passer devant la Comédie-Française, vous y lisiez sur l'affiche « Phèdre, tragédie de Racine, arrangée par M. Martin ou M. Durand ? » En cela se voit la différence entre l'oeuvre pensée, mûrie, gravée sur l'airain, et l'improvisation conçue au vol, bâtie en un tour de main, écrite au courant de la plume.
Il me reste quelques mots à dire des causes généraies, inhérentes au caractère national, qui ont empêché la comedia de s'élever aussi haut que d'autres théâtres modernes et de porter aussi loin. L'Espagnol ne manque pas d'imagination, il a l'idée nette et le don de la traduire en une forme vivante; il invente aisément une histoire et en combine avec adresse le plan, et tant qu'il obéit à son inspiration et compose, pour ainsi dire, sous le feu de l'idée, tout va bien. Mais à la première hésitation, au premier obstacle qui coupant par-ci, ajoutant par-là, car. il ajoutait aussi, le malheureux « On a fait en sorte que la nouvelle versification ne déparât pas l'ancienne. » Ce Don Candido portait un nom prédestiné. Parmi les refondeurs plus modernes, il suffit de citer le poète de talent et correct écrivain, D. Juan Eugenio Hartzenbusch.
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s'offre à sa pensée, le découragement et- le dégoût le prennent, l'ardeur dont il était animé au début se dissipe, l'enthousiasme se fond. Ne lui demandez pas de se reprendre ni de se corriger,. il ne sait ni finir ni polir castibare ad ungimn, ce n'est pas son affaire. De là tant de livres d'imagination inachevés, tant de romans dont la première partie seule a été terminée dé là aussi tant de drames, dont les données séduisent et l'exposition promet, et qui, en avançant, se perdent dans les méandres d'une action mal conduite, flottent au hasard et arrivent au dénouement parce qu'il faut bien en finir, que les douze pliegos sont pleins, mais non paa parce que la marche des événements réclame une catastrophe. Il était naturel que ce défaut inné de la race, ce laisser-aller une fois 1 oeuvre lancée, ce dédain de la lime se fissent sentir dans la comedia plus qu'ailleurs, eu égard à la qualité infériéure du genre et la précipitation avec laquelle les auteurs se croyaient tenus de composer.
Puis il y a autre chose: Les Espagnols sont volon- tiers sententieux et prêcheurs, ils ont toujours eu un goût prononcé pour la satire morale, et, Dieu merci, la terre d'Espagne a produit en assez grand nombre
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des casuistes et des moralistes. Certains genres même de leur littérature d'agrément, les nouvelles, entre autres, ont été par moments infestés de moralités. Le théâtre, toutefois, échappe à cette immixtion de la morale et de la sentence il y échappe trop, en ce sens qu'il manque d'un certain lest de doctrine, qu'il est trop exclusivement frivole, qu'il amuse ou émeut, mais selon notre goût du moins, n'enseigne pas assez, et ce n'est pas de ce théâtre-là qu'on dira jamais qu'il a été l'éducateur de la nation. Les auteurs de comedias n'ont pas su non plus s'élever au général. On ne saurait les blâmer, sans doute, d'avoir peint ce qu'ils avaient sous les yeux, l'homme tel qu'il s'offrait à leur observation, c'est-à-dire l'Espagnol du xvne siècle, et il est certain qu'à trop vouloir généraliser, on risque de mettre sur le théâtre des abstractions plutôt que des personnes vivantes mais entre les deux extrêmes, il semble toutefois qu'il y ait un terme moyen. Nos Espagnols sont déci.dément restés trop de leur terroir, les mœurs de leur théâtre sont trop imprégnées d'espagnolisme pour pouvoir intéresser qui ne possède pas une connaissancs intime du milieu. L'intelligence parfaite de ce
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drame exige une étude approfondie de l'histoire politique et littéraire, des usages et des modes de l'époque et du pays, et il ne faudrait pas croire que les Espagnols de nos jours puissent s'en dispenser. J'estime en effet que les remaniements qu'ils font subir, pour les représenter aux pièces de leur théâtre classique, tiennent aussi à ce que beaucoup d'allusions à d'an.ciennes coutumes éteintes, à des usages particuliers au xvne siècle, ne seraient plus maintenant comprises de personne.
Toutes ces causes réunies expliquent, je crois, le rôle modeste auquel seul peut prétendre la comedia dans le concert européen. Observation insuffisante, forme médiocre et trop étrange, mœurs trop partivoilà surtout ce qui lui a nui. Des qualités secondaires, je ne lui en refuserai pas, et, par exemple, la co media possède incontestablement, et grâce à ce particularisme sur lequel je viens d'insister, la valeur d'un document historique, non pas tant qu'elle nous représente très exactement la société, car les conventions de l'art dramatique, les ménagements à garder envers un public, maître de siffler comme d'applaudir, imposent y l'artiste bien des
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gênes, elle nous peint plutôt l'idéal de cette société, l'état de son imagination. En combinant son témoignage avec celui du roman et des autres documents qui copient de plus près la réalité, nous obtenons la résultante de la vie espagnole dans toutes ses manifestations, à une époque où elle présente la plus puis- sante originalité.
A un autre point de vue aussi il -convient de rendre, justice. à ce théâtre. Sachons-lui gré des efforts qu'il a faits pour enrichir le trésor commun de la littérature, dramatique, sachons-lui gré de cette masse énorme de sujets et de situations qu'il a comme jetés sur le marché, où beaucoup ont accouru et se sont enrichis à ses dépens. Et la mine n'est pas près d'être épuisée. Ne méconnaissons pas non plus le caractère national, patriotique de la comedia, qui est bien pour mériter notre sympathie. S'il est vrai qu'un grand théâtre puisse vivre et prospérer en ne s'alimentant que de la matière antique, et notre tragédie le prouve; ne refusons pas notre admiration à ceux qui ont. puisé dans leur propre histoire la substance de leur, drame héroïque. Nous qui n'avons rien voulu prendre à la nôtre, qui avons laissé hors du cadre de notre.
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tragédie les grandes figures de Charlemagne, de saint Louis et de Jeanne d-Arc, rappelons-nous ce que le théâtre espagnol a su faire du Cid, rappelons-nous ce
MAÇON, rnOTAT PHRIlliS, IMPHIMEIICS.
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sur papier d'Arches,
numérotés de 1 à 50.
ACHEVÉ D'IMPRIMER LE 25 JUIN 1923
SUR LES PRESSES
DE PROTAT. FRÈRES A MAÇON
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A la même Librairie Ancienne Édouard CHAMPION. Entrée d'Espagne, p. p. Ant. Thomas, 2 vol. (1913), chaque 25 fr.
COSTER (A.). Fernando de Herrara (El Divino). In-8. 9 fr. Algunas obras de Fernando de'Herrera, edicion critica. In-8. c 9 fr. Fitz-Gérald (J.-D.). La vida lie Santo Domingo de Silos, par G: de Bercer. Gr. in-8;- 2 pl. 12 fr. HÉRELLE (G). Études sur le théâtre basque. La représentation des Pastorales à sujets tragiques. In-8o raisin, r 174 p., 19 fig. 10 fr. Hollanda (F; de). Quatre dialogues sur lapeinture, mis en français par L.' Rouanet. Portrait de Michel-Ange et frontispice. In^- 18, 3 pi. 7 fr. 50 Huszar (G.). Études critiques de littérature comparée (ouvrage couronné par l'Académie française). Tome 1. P. Corneille et le théâtre espagnol. In-i 8; 5 fr. 25 II. Molière et l'Espagne. In-i 2.. :%7. fr. 50 L'influence de l'Espagne sur le théâtre français des xvme et xixe siècles. In- 12. .•̃. 6fr. Institut d'Estudis Catalans; Dépôt à Paris des publications archéologiques, historiques, etc. Liste sur demande.
Lettres du Duc de Bourgogne à Philippe V. Édit. Mgr BAUDRILLART' et M. L- LECES-fRE, 2 volumes. Chaque 12 fr. Libro de Apolonio, ari Old Spanish Poem, edited by C. CAR.roll Marden. Part I. Introduction and Text, LVII 7}- 76 pp. 9 fr. 10.– Part II. Grâmnar, Notes and Vocabulary, iv"-j- 191 pp. 18 fr. Pages (Amédée). Auzias March et ses prédécesseurs. Essai sur la poésie amoureuse et philosophique en Catalogne aux XIVe et XVe siècles. In-8, i planche en couleurs. 15 fr. 75
PALAU (B.). Farsa Hamada custolia del hombre, publicada cën una introduccion porLeo Rouanet. In-8. 15 fr. Revue de littérature comparée, dirigée par E. BALDENSPERGER et P. Hazard. Abonnement 40 fr. Tomes I et II. Chaque 50 fr. MACON, PROTAT FRÈRES, IMPRIMEURS.