« [Compte-rendu de Jean Prévost, Tentative de solitude] », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, septembre 1925, p. 1156-1157.

{p. 1156} « Dès que nous sommes seuls, nous sommes des fous. Oui, le contrôle de nous-mêmes ne joue que soutenu par le contrôle que les autres nous imposent », dit un héros de Mauriac. C’est un « homme seul » qu’a peint « par le dedans » M. Jean Prévost, en un saisissant raccourci psychologique. « Tout homme normal est fait de plusieurs fous qui s’annulent », écrit-il. Ce fou qui veut être soi purement, qui veut éliminer de soi tout ce qui est déterminé par l’extérieur, ce fou que nous portons tous en nous, il {p. 1157} l’a isolé, incarné, nommé : Revert. Puis il l’a poussé impitoyablement dans sa recherche d’un absolu qui se trouve être le néant. Pour finir il « l’écrabouille ». L’expérience est terminée. Artificielle comme toute expérience, elle n’en est pas moins probante.

Une œuvre d’art que ce petit livre ? C’est avant tout une démonstration ; mais, puissante de sûreté et d’évidence, elle a cette beauté froide et massive d’un théorème de Spinoza. Une ironie dure, la densité du style révèlent seules l’écrivain ; et aussi quelques sentences : « C’est de la faiblesse de nos yeux que frissonnent les étoiles. »