« [Compte-rendu de André Rolland de Renéville, Rimbaud le voyant] », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, août 1929, p. 250-251.

{p. 250} À lire ce petit livre et le parallèle qu’il établit entre la Yoga 1 telle que l’enseignaient les Upanishads et la tentative poétique de Rimbaud, l’on s’étonne qu’il ait fallu plus d’un demi-siècle pour qu’une telle interprétation voie le jour. Cela pourrait donner lieu à de mélancoliques réflexions sur le génie « poétique » français… Mais non, nous préférons voir ici l’un de ces signes qui de toutes parts annoncent une rentrée de l’âme dans la littérature la plus spirituelle du monde.

La thèse que défend l’auteur de cet essai la voyance de Rimbaud est une de ces évidences qu’il est bon de proposer à la réflexion de notre temps, ne fût-ce que pour faite honte à ceux qui sont encore capables d’une telle honte, de leur indifférence à l’endroit de l’être le plus monstrueusement pur qui se soit révélé par le truchement de la poésie française. Livre un peu didactique, trop attentif à sa propre démarche, mais inspiré par cet enthousiasme sacré que requiert l’œuvre de Rimbaud. {p. 251} Regrettons seulement qu’il n’élargisse pas plus une question aussi centrale qui est, si l’on veut, la question d’Orient-Occident. Et pourquoi cette hostilité de sectaire contre l’interprétation proposée par Claudel et Isabelle Rimbaud ? Si Claudel s’est montré partial en faisant de Rimbaud, « mystique à l’état sauvage », un catholique qui s’ignore, il n’est pas plus admissible d’inférer du mépris de Rimbaud pour le catholicisme à son mépris pour la révélation évangélique. Je ne vois là que l’indice d’une confusion bien française, hélas.