« [Compte-rendu de André Jullien du Breuil, Kate] », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, avril 1930, p. 520.

{p. 520} Ce récit d’une élégante minceur décrit la passion d’une jeune fille de la grande bourgeoisie pour une gamine qui lui sert de modèle dans son atelier. Autour de cet incident, assez émouvant, on entrevoit la famille indignée, une mère qui souffre, un jeune frère qui rêve. Le livre se résout dans une amertume vague.

Ceux qui ont lu la Mort difficile de René Crevel ne s’étonneront ni du sujet ni de la manière de M. Jullien du Breuil. L’intérêt de ce genre de livres ils se multiplient vient, à mon sens, de quelque chose qu’ils expriment sans doute inconsciemment et qui n’est rien de moins qu’une conception nouvelle de l’amour-passion : il apparaît ici sous la forme d’une obsession physique, parée d’une sorte de poésie fatale, où se mêle, selon l’auteur un peu ou pas mal de littérature. Et c’est à un tel amour qu’on va demander sa revanche contre la mesquinerie morale du milieu… Étrange misère que celle d’une génération qui, après tant de sarcasmes contre l’enfer bourgeois, n’a trouvé d’autre salut que l’abandon à quelques obsessions sexuelles. Qui viendra rendre le sens de l’amour idéal celui qui transfigure ?

Le roman de M. Jullien de Breuil effleure un autre problème de non moindre valeur tragique : le conflit de la jeunesse d’après-guerre et des parents. Encore un sujet qui attend son maître.