LOUIS par la grâce de Dieu Roi de France et de Navarre, à nos amés et féaux Conseillers les Gens tenants nos Cours de Parlement, Maître des Requêtes ordinaires de notre Hôtel, Baillis, Sénéchaux, Prévôts, leurs Lieutenants, et autres nos Justiciers et Officiers qu'il appartiendra , Salut. Notre bien amé ANTHOINE DE SOMMAVILLE, Marchand Libraire, Nous a fait remontrer qu'il désirait faire imprimer un Livre intitulé, Cléomédon, Tragi-Comédie, ce qu'il ne peut faire sans avoir sur ce nos Lettres humblement requérant icelles. A ces causes désirant favorablement traiter ledit exposant, Nous lui avons permis et permettons par ces présentes de faire imprimer, vendre et débiter ledit Livre en tous les lieux et terres de notre obéissance, par tels Imprimeurs, en telles marges et caractères, et autant de fois qu'il voudra, durant le temps et espace de sept ans entiers et accomplis, à compter du jour qu'il sera achevé d'imprimer. Faisant défenses à tous Imprimeurs, Libraires et autres de quelques conditions qu'ils soient, tant étrangers, que de notre Royaume, d'imprimer, vendre ni distribuer en aucun endroit ledit Livre sans que le consentement de l'Exposant, o[u] de ceux qui auront droit de lui en vertu des présentes, ni même d'en prendre le titre, ou le contrefaire en telles sortes et manière que ce soit, sous couleur de fausse marge ou autre déguisement, sur peine aux contrevenants de trois mil livres d'amende, applicable un tiers à Nous, un tiers à l'Hostel-Dieu de Paris, et l'autre tiers à l'Exposant, de confiscation des exemplaires contrefaits, et de tous dépens, dommages, et intérêts : Même si aucuns Libraires et Imprimeurs de notre Royaume, ou étrangers trafiquants en icelui étaient trouvez saisis des exemplaires contrefaits, Nous voulons qu'ils soient condamnés en pareils amendes que s'il les avaient imprimez, à condition qu'il sera mis deux exemplaires dudit Livre dans notre Bibliothèque publique, et un autre en celle de notre très cher et féal le Sieur Séguier Chevalier, Chancelier de France, avant que pouvoir exposer ledit Livre en vente, à peine de nullité des présentes, Du contenu desquelles Nous voulons, et vous mandons que vous fassiez jouir et user pleinement et paisiblement ledit Exposant, où ceux qui auront charge de lui, faisant cesser tous troubles et empêchements si aucuns leur était donné. VOULONS aussi qu'en mettant au commencement ou à la fin dudit Livre un extrait des présentes, elles soient tenues pour dûment signifiées, et que foi y soit ajoutée comme à l'original. MANDONS en outre au premier notre Huissier ou Sergent sur ce requis, de faire pour l'exécution des présentes tous exploits nécessaires, sans demander autre permission : CAR tel est notre plaisir, nonobstant Clameur de Haro, Charte Normande, prise à partie, et lettres à ce contraires. Donné à Paris le dernier jour de Décembre l'an de grâce mil six cens trente-six, et de notre règne le vingt-sixième.
Par le Roi en son Conseil,
DEMONCEAUX.
Je ne vous dirai point quel est ce Cléomédon, que j'ose aujourd'hui vous présenter ; Vous le connaissez, puisqu'il est né en votre maison, et vous l'avez toujours si favorablement élevé depuis sa naissance, qu'il ne peut plus passer pour inconnu auprès de votre Grandeur. Il est Prince, Mais il n'est pas de ceux qui n'ont besoin que d'eux-mêmes pour se conserver l'éclat d'une condition si relevée ; Sa puissance n'est pas capable de travailler toute seule à l'établissement de sa gloire, et s'il n'est secouru de l'estime, dont vous l'avez toujours honoré, je désespérerai bientôt de son avancement. Par cette précieuse estime il a commencé de devenir grand, et par elle seule il s'est fait même considérer par ces juges sévères, qui ne trouveraient rien d'héroïque au monde si votre vertu ne s'y rencontrait pas. Continuez-lui donc, Monseigneur, cet heureux avantage, et jugez après tout qu'il est de la gloire d'un grand Prince de protéger un Prince qui ne peut subsister de lui-même. Cléomédon est né seulement pour vous plaire, permettez qu'il vive seulement pour s'avouer de vous ; Et puis que je ne veux vivre que pour le même dessein pour lequel est né celui que je vous présente, permettez aussi que je puisse incessamment publier que je suis,
MONSEIGNEUR,
De votre Grandeur.
Le très humble, très obéissant, et très fidèle serviteur, DU RYER.